Avec ce qui tient lieu de présent, il n’est pas toujours évident de s’en rendre compte mais c’est indéniable : l’homme progresse. J’en veux pour preuve cette formidable publicité vantant les mérites d’un clavier portable Yamaha, sorti en 1984.
Voyez cet homme qui éveille la concupiscence chez les deux sexes et sur trois générations grâce à son seul clavier Yamaha. Impossible de dire ce qu’il joue, mais c’est sans doute une chanson très drôle à en croire l’hilarité de l’assistance qui tripote ses haltères roses, ses aiguilles, sa fougère ou son verre de Tang multivitaminé sans le quitter des yeux, lui ou son long Portatone. À moins évidemment que tous ne soient morts de rire en entendant les ‘pouets’ qui sortent de cette merveille de technologie, à moins peut-être qu’ils aient tous fumé des fougères, on croirait les entendre parler : « Ah ! Si j’en avais un comme ça ! » pense Beau-Papa. « Ah ! Si mon mari en avait un comme ça ! » pense Belle-Maman, tandis que Mamy sourit pour faire croire qu’elle entend le biniou du bellâtre au pull. Ne manquent qu’un épagneul qui se frotterait sur la jambe de Mamy et un enfant blond qui boirait du lait en riant lui-aussi pour que le tableau soit complet et que Patrick Bateman sonne à la porte. En l’état, on se croirait tout de même dans un mélange du Théorème de Pasolini, de la Clinique de la Forêt-Noire et de Cluedo : qui va se taper Monsieur Bleu ? Mademoiselle Mayo bien sûr, avec son verre de Tang sur la terrasse, à moins que l’haltérophile ne rabatte sa victime dans la salle de sport avec son machin rose…
Bref, merci Yamaha pour ce bon moment : les PS-35 et 55 n’auront pas forcément marqué l’histoire, mais cette réclame vieille de plus de 30 ans aura le mérite de nous faire sentir comme de l’eau a coulé sous les ponts depuis. Les filles sont certes loin d’être sorties du pétrin sexiste, y compris dans le monde de la musique, mais au moins on ne vend plus de clavier avec un pull sur les épaules : et même si c’est bien maigre, c’est déjà un notable progrès.
Le matos audio et les instruments ont, eux aussi, fait bien des progrès : nul n’imaginait en 84 qu’on aurait un jour des simulateurs d’ampli guitare de la trempe de l’Overloud TH3, ou que la mode chez les guitaristes serait au looper comme l’excellente pédale Ditto X4 de TC Electronic. Nul ne pouvait concevoir non plus que 30 ans après sa sortie, le casque Beyerdynamic DT 770 tiendrait encore la dragée haute à son descendant le DT 770 Pro, pourtant bien plus cher. Nul ne se doutait enfin que c’est avec Mamy que finirait le bellâtre, parce que la maison lui appartenait, qu’elle n’avait pas son pareil pour tricoter des pulls bleus et qu’être sourde, c’est un avantage déterminant quand on partage la vie d’un joueur de PS-55.
Sur ce, bon week et à la semaine prochaine.
Los Teignos
From Ze AudioTeam
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